VIS à VIS avec la diaspora africaine et des représentants d’associations travaillant pour des causes africaines

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Posted on April 21, 2021

VIS à VIS AVEC LA DIASPORA AFRICAINE

COMPTE RENDU DE LA RÉUNION

28 AVRIL

17H-19H 

 

Etaient présents

  • Marcello Aglietti Zanon
  • Ahlam Chokrani
  • François d’Adesky
  • Serge de Patoul
  • Géraldine Dezé
  • Andréa Kalubi
  • Momi M’buze Noogwani Ataye Mieko
  • Audric Mitraros
  • Sara Montersino
  • Valentina Zoccali

La réunion a commencé par la prise de parole du président de S-Com, Marcello Aglietti qui a présenté l’association ainsi que ses objectifs globaux. Il a ensuite présenté le projet VIS-À-VIS ainsi que ses objectifs et sa méthodologie : (voir 1er PowerPoint de présentation).

La 1ere phase du projet est dédiée à l’organisation de séminaires avec des experts dans différents secteurs pour créer des outils de détection des données, un guichet de soutien aux victimes des messages de haine considérés légaux et un guide pédagogique. La 2ème phase du projet sera dédiée à l’élaboration des outils et à lancer la plateforme informatique qui se nommera « Guichet d’aide aux victimes ». En vue de créer ce guichet, nous élaborons un Mémorandum of Understanding (MoU – voir annex 1) que nous souhaitons proposer aux invité.e.s. à cette réunion.

Valentina Zoccali, secrétaire générale de S-Com prend ensuite la parole pour présenter brièvement une synthèse des activités du projet mise en place depuis le début (Décembre 2020) jusqu’à maintenant. Pendant la 1ère réunion VIS-À-VIS les 4 points qui caractérisent les discours de haine en ligne ont été mis en évidence : la longévité, l’itinérance, l’anonymat, la portée transnationale d’internet. Les participant.e.s. présent.e.s à la réunion ont aussi mentionné le besoin de contrer le discours de haine en ligne par l’éducation de base aux médias. La 2ème réunion s’est déroulée avec la diaspora italienne. Ce qui en est ressorti c’est que le racisme change et évolue avec le temps et que le Covid a eu un impact important sur la diffusion de la haine en ligne. Ensuite Valentina présente les réponses au questionnaire qui a été mis en ligne par S-COM: en invitant les participants à partager le questionnaire avec les membres de leurs associations afin d’élargir l’échantillon des personnes questionnées. Ensuite Valentina présente le MoU aux participant.e.s. : y adhérer signifie pouvoir donner suite au projet VIS-À-VIS après cette 1ère année surtout pour permettre de structurer la plateforme. Valentina demande aux invité.e.s de contribuer à l’élaboration et à la finalisation du texte du MOU, qui sera envoyé à celles et à ceux qui le souhaitent pour des suggestions de formulations adéquates. Ensuite, Valentina présente l’agenda des prochaines rencontres du projet VIS-À-VIS. (voir PPT)

Ensuite Ahlam Chokrani prend la parole en tant qu’assistante de projet S-Com. Elle présente les intervenant.e.s avec un bref résumé de leur parcours pour après leur donner la parole afin qu’ils témoignent de leurs expériences.

Notre 1er intervenant est M François d’Adesky, Administrateur du PEN CLUB Belgique (asbl qui rassemble des écrivains des journalistes et des poètes qui défendent la liberté d’expression et la promotion de la littérature), Co-fondateur de l’association « Métis de Belgique » et ex-fonctionnaire international auprès de l’ONU et de la Francophonie. Il est également militant écologiste. Le témoignage de François d’Adesky par rapport au discours de haine est conséquent. Il a été en effet confronté très tôt à la discrimination et à la haine en raison de ses origines métisses (Rwanda/Belgique), tant au niveau personnel que professionnel. Il met notamment en avant qu’on ne peut pas parler de haine et de racisme sans parler de l’histoire coloniale de la Belgique en Afrique. Ce sont les stéréotypes du passé colonial de la Belgique, qui nourrissent le racisme structurel en Belgique et qui se manifeste principalement dans les domaines de l’emploi et de la recherche de logement. Lors de ses expériences au sein des parlements de Belgique afin que la vérité sur le « déplacement » forcée des centaines d’enfants métis hors d’Afrique organisé par le Gouvernement belge lors des indépendances de l’ex-Afrique belge, il a été confronté à des discours de haine de manière indirecte et sarcastique. Il donne des informations importantes concernant le racisme en Belgique et la pratique raciste de l’administration coloniale belge.  D’ailleurs, il n’a pas pu profiter du système éducatif belge réservé aux « blancs » dans l’ex-Afrique belge. Il a dû notamment être envoyé en pensionnat réservé aux métis pour accéder à l’éducation. La Belgique avait instauré deux systèmes juridiques séparés dans le même territoire colonial : le droit civil pour les européens, et le droit coutumier pour les africains, ce qui permettait aux belges d’exploiter les populations autochtones. François d’Adesky souligne aussi que les italiens, les espagnols et les portugais ont également été confronté au racisme en Belgique mais que celui-ci s’est atténué plus vite de par leurs origines et leurs valeurs communes européennes. La visibilité de leurs contributions au développement de la Belgique, ainsi que le développement de leurs pays d’origine, leur a en retour procuré du prestige auprès de la population de Belgique. François d’Adesky et son organisation ont dès lors fait des démarches parlementaires pour que l’histoire douloureuse des métis coloniaux « déplacés » de force vers la Belgique soit connue, que des excuses soient présentées et que les séquelles des discriminations coloniales envers les métis soient réparées. Cette démarche de « réconciliation » vise également à une meilleure intégration permettant que les métis soient considérés comme des belges à part entière. Il conclut enfin qu’il faut pousser la Belgique à reconnaitre son histoire et son passé colonial et à l’inclure dans ses manuels scolaires. Cette reconnaissance pourrait être un 1er pas pour résoudre ces problèmes de racisme systémique en Belgique.

La deuxième intervention est celle de M MOMI M’BUZE qui est écrivain et activiste panafricain. Il fait partie de la vague des activistes « historiques ». Il donne notamment des cours d’histoire de l’Afrique à des jeunes pour développer leur sens critique face à leur histoire. MOMI M’BUZE n’hésite pas non plus à confirmer que l’histoire enseignée en Belgique a été comme un vecteur de haine et de discrimination, comme l’a mentionnée auparavant M François d’ADESKY. Il a été est très déçu du travail de décolonisation du musée de Tervuren qui n’a pas été à son avis réalisé. Il fait le constat actuel que la nouvelle génération est à la recherche d’informations qui proviendrait directement de chercheurs et d’historiens africains plutôt que d’accepter une vision historique européenne. Son souhait est d’aider les jeunes à accéder à ces informations par le biais des associations qu’il anime.

MOMI M’BUZE est passé de l’activisme congolais à l’activisme plus panafricain car il apparaît que la même méthodologie esclavagiste a été et est encore maintenant envers plusieurs peuples africains. il ajoute également qu’il n’a jamais été confronté de manière directe à la haine mais que par contre, il y a un discours sous-jacent qui est présent dans les différents aspects de la vie quotidienne. Par exemple lors de recherches d’un logement. Il insiste enfin sur le fait qu’il faut faire comprendre aux jeunes les relations entre les peuples afin qu’ils grandissent avec un imaginaire différent pour éviter certains comportements revanchards qui risquent d’augmenter en Europe.

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AUDRIC MITRAROS, notre 3ème intervenant est né d’une mère belge et d’un père greco-congolais et a grandi au Rwanda.  Il a été confronté très tôt au racisme en comprenant très vite qu’il était perçu ou traité différemment sur base de sa couleur de peau et de son origine. Par exemple, au Rwanda, il a été perçu comme un blanc et en Belgique comme un noir.  Il a dès lors bénéficié des privilèges associés aux européens au Rwanda mais en Belgique c’était souvent l’inverse.  Au moment du génocide des Tutsis et Hutus modérés, Audric et sa famille se font rapatrier en Belgique et c’est dans une école primaire de Wallonie qu’il découvre le racisme anti- « noir ». En effet, il a eu du mal à comprendre pourquoi on le traitait de « petit noir », ayant vécu le racisme à l’envers au Rwanda. Il a commencé à sentir le rejet en école primaire en prenant conscience de sa différence de couleur. Donc, il a dû commencer très tôt son travail de déconstruction. A propos de la haine en ligne, Audric a l’impression qu’il y a confusion entre le symptôme et la cause. Pour lui, les discours de haine en ligne sont plus souvent des symptômes de quelque chose qui est dysfonctionnel. Il faut traiter dès lors ses causes dysfonctionnelles par la déconstruction de l’histoire. Audric suggère alors de régler les problèmes de haine et de discours de haine en ligne par l’éducation.  Il a notamment été récemment soumis à des agressions subtiles et à des discours de haine sur les réseaux sociaux en fonction de son âge et d’appartenance ethnique. D’ailleurs, la crise du covid et le mouvement BLACK LIVES MATTERS ont exacerbés le niveau des discours de haine sur les réseaux sociaux. Être exposé en permanence à ces sujets sur les réseaux sociaux a poussé Audric à les quitter tout simplement au lieu d’essayer de faire changer les discours haineux des gens.

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Mme Andrea KALUBI notre 4ème intervenante et est assistante parlementaire mais aussi activiste qui a défendu les droits humains au Congo. Elle a co-fondé récemment JAMII ASBL ; une association qui lutte contre les violences et les discriminations à travers la culture, l’histoire et le sport. Elle a été malheureusement confrontée à de la haine en ligne à cause de par son statut de femme. Andréa Kalubi souligne qu’on peut facilement être surpris de ne pas pouvoir contrôler ces discours de haine derrière son écran. Heureusement elle a été bien entourée pendant cette période de confrontation à la haine en ligne. Elle a en effet pu combattre ce phénomène en disparaissant des réseaux pendant une semaine pour ensuite présenter en ligne une vidéo qui explique ce qu’est le cyberharcèlement.  Elle dit que suite à la marche du 7 juin (BLACK LIVES MATTERS), il y a eu une recrudescence de discours de haine raciale sur internet entre les différentes communautés, mais aussi une augmentation des violences policières envers les jeunes. Andréa Kalubi met en évidence également le fait que les médias et les politiciens facilitent ce genre de propos haineux sur internet en livrant une information que d’un seul point de vue, celui des policiers.  Andréa Kalubi en conclu que les jeunes sont perdus suite à ces déversements de haine en ligne. Le projet VIS-À-VIS pourrait jouer un rôle fondamental à condition de sortir de l’invisibilité avec une médiatisation plus importante au niveau national et international.

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Notre 5ème intervenante est l’administratrice de l’ASBL RANA (Refugiees Are Not Alone) : GERALDINE DEZE. Elle travaille actuellement à la coopération internationale. Géraldine DEZE félicite tout d’abord notre initiative VIS-À-VIS qui, avec notre panel de différent.e.s. invité.e.s,  traduit bien  la richesse de notre société. Ensuite, elle nous informe de la campagne de sensibilisation que lancera RANA ASBL pour casser les stéréotypes sur les réfugiés à Bruxelles (volent le travail, font peur, violent les femmes). Géraldine DEZE nous informe également que les différentes grandes ONG ont commencé une réflexion sur les bonnes pratiques ainsi que sur les concepts mensongers que les pays du Nord ont la solution pour les pays du Sud. Elle n’a jamais été victime de harcèlement en ligne car elle n’est pas présente sur les réseaux sociaux mais elle voit de loin ce qu’il s’y passe et trouve cela affligeant. Selon elle, les outils que nous pourrions développer ensemble pourront aider à cette diminution de haine en ligne

SERGE DE PATOUL, est ex-parlementaire, député et échevin ainsi que professeur. Il remercie les intervenant.e.s. en insistant sur l’énorme richesse de ces interventions.  Ensuite M Serge de Patoul nous résume la réunion en disant que c’est essentiellement grâce au travail de mémoire de tout peuple pour comprendre son histoire que nous pourrons apporter des solutions futures à la haine. Il ajoute également que le discours ambiant qui conditionne les citoyens est assez traître car il peut se faire dans un cadre de bonne foi sans s’en rendre compte (un raciste qui ne se connait pas).  Dans ce cas-ci, personne ne se dit directement harcelé sauf pour des questions de sexe ou de couleur de peau. La manière dénigrante est mise en avant ainsi que le côté « défouloir » de ces violences haineuses en ligne. A travers plusieurs témoignages, la crainte de l’inconnu, la méconnaissance de l’autre stimule ces réactions de haine en ligne. Il indique également le travail en aval qui doit être fait pour éduquer et diminuer la méconnaissance de l’autre afin de rapprocher les communautés (racisme par méconnaissance).

Momi M’BUZE reprend la parole pour ajouter qu’il y a des manières bien plus qu’académiques pour enseigner l’histoire et faire ce travail de décolonisation et de sensibilisation.

François d’Adesky reprend ensuite la parole en disant qu’il y a eu une évolution par rapport au racisme défouloir et violent de l’époque. Il espère qu’à la suite de la crise du Covid-19 il y aura une perception eurafricaine de l’interdépendance entre l’Europe et l’Afrique, pour construire un partenariat entre égaux, car le destin de l’Europe et de l’Afrique est « commun ».

La future directive européenne contre le racisme devrait faciliter le combat anti-raciste en Belgique.

Par ailleurs, la perception de l’interdépendance de tous les humains entre eux mais aussi entre eux et la nature facilitera les transitions environnementales, sociales et économiques vers un développement mondial durable. Ceci est la condition primordiale pour avoir la paix sur terre entre les peuples. Selon lui, c’est possible.

SERGE DE PATOUL rebondit sur l’intervention de FDA qui est un discours optimiste et revient sur une manière plus pragmatique et demande des réactions et/ou souhaits du MOU.

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Marcello Aglietti Zanon: On peut rajouter d’autres éléments aux objectifs et des directives européennes qui est en préparation.

Valentina Zoccali : introduit l’appel à projet de la Commission Européenne contre la haine en ligne qui pourrait être la première activité commune des signataires du MoU. La date de présentation du projet est le 15/06.

 


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